Le temps

(limité) de militer.

Éloïse Cabral

Je vis avec un mal-être constant


Que j’ai essayé de comprendre au fil des années


J’ai découvert nombre d’auteurs, de concepts, qui ont su décrire ce même malaise profond


 


On nous dit que pour atténuer l’écoanxiété, il faut s’engager, se mettre en action, ne pas rester seul dans son coin


Mais comme pour beaucoup de monde, même ça, ce n’est pas accessible


On a oublié comment vivre en communauté


On n’a plus le temps, pris à étudier temps-plein, travailler temps-plein, faire du sport, bien manger, avoir une vie sociale riche


Autant d’injonctions d’un système qui pousse à la performance, à l’immédiateté


On est pris dans un tourbillon qui nous fait oublier ce que c’est que de vivre


 


Mes premiers pas pour me mettre en action sont petits


Mais ont une portée plus grande


Je travaille peu


J’étudie à temps partiel


J’achète peu de choses et seulement de l’usagé


À ma façon, je refuse radicalement un système qui menace jusqu’à notre propre survie


J’essaie de ralentir, de mieux occuper mon temps


Et de donner plus de temps aux activités de création


Couture, bricolage, cuisine, coiffure, jardinage


J’essaie de m’impliquer dans ma communauté


Et d’incarner toutes les idées et modes de vie alternatifs que j’ai vus dans les livres


Réduction à la source, engagement citoyen, décroissance


 


Je crois sincèrement que c’est là que réside le défi le plus important en environnement :


La concrétisation de tous les concepts et idées dont on parle et remâche depuis des décennies


Fondamentalement, on le sait tous qu’il y a un problème


Là-dessus, nos sens ne nous trompent pas, même si on se plie en quatre pour faire des démonstrations scientifiques pour convaincre les décideurs politiques :


On est de plus en plus malades – physiquement et mentalement


On passe de températures extrêmes en records annuels de plus en plus fréquemment


On voit moins d’insectes et d’animaux


L’air est lourd, pollué


Chaque année, plus d’inondations et de feux de forêt


Ça sent l’apocalypse


 


Je ne crois plus en la capacité des systèmes économiques et politiques d’être les agents de changement


Parce que même les personnes les mieux intentionnées dans ces arènes rencontrent des murs trop bien érigés pour être démolis


Je crois donc en toi, en elle, en vous, en moi


Je crois en ces gens qui tous les jours refusent à leur manière un mode de vie aliénant


Je crois à un retour aux communautés de proximité


Je crois à une mobilisation par le bas


Parce que si le système nous a lâché.e.s, nous avons au moins le pouvoir de nous tenir entre nous